jeudi 27 novembre 2014

L'épopée de Gilgamesh

La première œuvre littéraire de l'Histoire

Tablette n°11 de l'Epopée de Gilgamesh
C'est dans les années 1850 que furent découverts, par les archéologues A. H. Layard et H. Rassam, près de 30 000 textes ensevelis durant des siècles dans la Bibliothèque d'Assurbanipal, un ancien roi assyrien, à Ninive (dans l'actuel Irak). Ces textes sont rédigés en écriture cunéiforme (dont les caractères sont en forme de coins) sur des tablettes d'argile, majoritairement en langue akkadienne, et se composent essentiellement de documents religieux ou administratifs. Il faut toutefois attendre le déchiffrage de cette ancienne écriture pour qu'une série de douze tablettes sortent du lot. Cette série raconte la légende du roi Gilgamesh à travers ce qui est considéré actuellement comme la première œuvre littéraire de l'Histoire, plus ancienne encore que « l’Iliade » et « l’Odyssée » d'Homère. 


Cette histoire vieille de plus de 4000 ans est aujourd'hui connue sous le nom  de « L' Épopée de Gilgamesh ». Interventions des dieux, figure typique du héros, naissance et perte d'une amitié, quête initiatique et de l'immortalité,... autant de thèmes que l'on retrouve dans les mythes grecs futurs et qui apparaissent déjà dans cette œuvre babylonienne.

Résumé de l’Épopée de Gilgamesh

Représentation de Gilgamesh
Sur la façade du palais de Sargon II
à Khorsabad

Roi d'Uruk (situé dans l'actuel Irak), Gilgamesh est présenté dès le début comme un despote cruel et brutal envers ses sujets. A tel point que ces derniers vont en appeler aux dieux pour les protéger de la folie et des pulsions destructrices de leur souverain. Pour contrer le tyran, les dieux décident de modeler dans de l'argile un homme fort et sauvage, de lui donner la vie et de l'envoyer sur la terre. L'objectif d'Enkidu, car tel est son nom, est donc de combattre et terrasser Gilgamesh. Vivant dans un premier temps, en pleine nature avec les bêtes sauvages, Enkidu va petit à petit connaître les plaisirs de la civilisation en la compagnie d'une courtisane et gagnera en humanité. Vient alors la rencontre entre les deux hommes, Gilgamesh et Enkidu, qui précède une longue lutte à mains nues. Constatant qu'ils sont de forces égales, ils décident de cesser le combat et se lient d'une amitié quasi-fusionnelle.
A eux deux, il vécurent plusieurs aventures qui les amenèrent à tuer le géant Humbaba, protecteur de la Forêt de Cèdres interdite aux mortels, et le taureau céleste. Ce dernier fut envoyé par Ishtar (l'Aphrodite babylonienne) contre Gilgamesh, vexée que celui-ci ait repoussé ses avances.
Sous l'impulsion des dieux, offensés par tant de provocations, Enkidu tombe malade et meurt. Ce décès va anéantir Gilgamesh qui, dès lors, va développer une hantise obsessionnelle de la mort. 


 Cette peur le mène à rechercher l'immortalité. Pour ce faire, il part à la recherche de Utanapishtim, le seul être humain à avoir survécu au Déluge (celui également mentionné dans la bible) et auquel les dieux ont fait le don de l'immortalité. Après un long périple et diverses épreuves, le roi d'Uruk finit par trouver l'immortel mais ce dernier ne peut satisfaire sa demande. Utanapishtim lui explique que seuls les dieux sont aptes à accorder cette immortalité tant convoitée.
Gilgamesh revient donc à Uruk mais, s'il n'a pas obtenu l'immortalité, l'amitié d'Enkidu et les diverses épreuves passées ont métamorphosées ce roi devient plus tard un sage et accepte sa condition de mortel.
 

Gilgamesh dans Fate Stay Night
Le personnage de Gilgamesh dans la culture populaire

« L’Épopée de Gilgamesh » et le personnage même du roi d'Uruk furent adaptés sous plusieurs formes artistiques. L'écrivain américain Robert Silverberg en fit un roman, « Gilgamesh, roi d'Ourouk » (1984), s'appuyant sur le récit et développant l'aspect psychologique de ce roi tourmenté. Plus surprenant est la suite qu'il écrivit cinq ans plus tard : « Jusqu'aux portes de la vie ». Dans celui-ci, on retrouve Gilgamesh dans un univers où tous les morts sont ressuscités. Il va alors partir à la recherche de son ami Enkidu.
Gilgamesh eut le droit aussi à sa série de bandes dessinées en 2 tomes ( de Gwen de Bonneval et Frantz Duchazeau) reprenant là encore l'histoire telle qu'elle est résumée plus haut. Plus curieux, Marvel a également employé le nom de Gilgamesh pour un de ses super-héros ; un héros immortel cette fois.

 
Plusieurs opéras portent le nom de Gilgamesh et s'inspirent de son histoire. On peut citer par exemple celui de Per Nørgård.
Plus moderne, le groupe de Visual Kei Girugamesh a emprunté son nom au célèbre roi légendaire.
Des séries télévisées comme Star Trek, Highlander ou encore Futurama ont fait référence au personnage. A noter que dans Highlander, Gilgamesh est un immortel.
On retrouve aussi le nom de Gilgamesh dans de nombreux jeux videos : dans plusieurs Final Fantasy, Devil May Cry 4, Titan Quest, Fate/stay night...
Bien entendu, il ne s'agit ici que de quelques exemples et les œuvres faisant références à l’Épopée de Gilgamesh sont nettement plus nombreuses.
Pas aussi connu qu'un Ulysse, un Hercule ou autre héros gréco-romain, l'impact de Gilgamesh sur la culture populaire n'est toutefois pas négligeable. Après le projet avorté d'une adaptation cinématographique (avec Omar Sharif) de ce mythe mésopotamien, on attend toujours un long-métrage sur l’Épopée de Gilgamesh.


Damien

lundi 24 novembre 2014

Naruto - Masashi Kishimoto

Naruto, manga de Masashi Kishimoto est publié dans l'hebdomadaire Weekly Shônen (magazine japonais qui publie des mangas) depuis 1999, et en France chez les éditions Kana.



On a tous entendu parler au moins une fois de ce manga ou vu ce personnage reconnaissable à sa coupe de cheveux blonde ébouriffée. Il fait partie des Shonen (manga pour jeunes adolescents garçons mais ça n'empêche pas les filles de les lire)  très connus avec Dragon Ball Z et One Piece. Il s'est achevé dernièrement, après quinze ans de publication, et compte en tout sept cent chapitres (l'édition française n'en est pour le moment qu'au chapitre 627).
L'aventure continue toujours avec un film en attente : « The last-Naruto, the movie ». Il est également prévu pour printemps 2015 une suite basée sur la génération future en deux ou trois tomes.

Alors, Naruto de quoi ça parle ?
L'histoire se situe dans un monde de ninja, divisé en plusieurs pays, chacun possédant son pouvoir militaire propre. Chaque ninja utilise le Ninjutsu (répertoire des techniques ninjas) grâce aux différents éléments (feu, eau...). Naruto vit à Konoha, le village caché de la Feuille dans le Pays du Feu, dirigé par le Hokage (chef du village). Le héros, Naruto, souhaite lui-même devenir le Hokage, c'est à dire LE ninja le plus fort du village. 




Amaterasu, déesse du Soleil

Or, Naruto n'est pas spécialement doué, c'est même un cancre (et il en est très fier !). Autant dire qu'il va devoir faire de prodigieux efforts pour s'améliorer.

On apprend très vite au début de l'histoire, que Naruto, orphelin et seul, est le réceptacle de Kyubi, le démon renard à neuf queues qui a attaqué son village douze ans auparavant. Ce monstre qui est en lui est un Bijuu. Il s'agit d'une créature de la mythologie japonaise. Son véritable nom est Kitsune et il est le plus puissant des Bijuu. Il possède plusieurs pouvoirs, dont celui de se changer en jeune fille (cela rappelle étrangement le sort de Naruto, le « Sexi méta » où il se change en fille nue pour faire des farces ). Naruto doit désormais vivre avec ce fardeau qui l'a exclu du village. Il a vécu dans la solitude, faisant le pitre pour qu'on le remarque et prouver qu'il existe. Pour se faire accepter dans son village, il doit prouver sa valeur et sa volonté aux villageois. On retrouve parmi eux les maîtres ninjas et les aspirants ninjas qui vont devenir au fil de l'histoire ses amis, que nous allons voir grandir et évoluer avec lui. 







Izanagi et Inazami

Naruto fait partie de l'équipe 7, dirigée par Maître Kakashi. Ses compagnons sont Sakura et Sasuke, qui deviendra son plus grand rival.
Ce personnage représente le parfait opposé de Naruto : doué, fort, intelligent. Parfait, sauf son petit côté arrogant puisqu'il sait qu'il est un aspirant très fort. Dès le début, ce personnage a pour but de venger son clan et de tuer celui qui a décimé sa famille. C'est un personnage très lié à notre héros et qui possède également des rapprochements avec la mythologie japonaise.
Le clan Uchiwa, dont fait partie Sasuke, maîtrise le Sharingan (technique ninja utilisant la pupille de l'oeil). Plusieurs techniques sont des clins d’œil à des dieux Japonais.
On retrouve par exemple Izanagi et Inazami qui font parties des sorts les plus puissants. Dans le shintô (« voie des dieux »), les japonais vénèrent plusieurs divinités dont les Kamis. Ces deux divinités ont créé le monde. Leurs enfants sont également cités dans Naruto : Amaterasu, déesse du Soleil qui est, dans l'histoire, un sort composé de flammes noirs impérissables. On a également Susanoo, le dieu des Tempêtes et de l'orage qui est représenté par une technique défensive et offensive. Et enfin, on a Tsukuyomi, le dieu de la lune, qui est un sort qui apparaît plus tard dans l'histoire. 



 
Susanoo
Notre héros est confronté à toutes sortes de dangers et d'ennemis durant l'histoire et doit faire face à la violence et à la cruauté du monde des ninjas. Malgré le côté très Shonen, avec  « Vive le pouvoir de l'amitié! » qui peut être très rébarbatif au bout d'un moment, l'approche des personnages est vraiment intéressante. Les intrigues secondaires  sont bien amenées. Kishimoto sait créer des personnages charismatiques avec une histoire souvent profonde derrière.

 /!\ SPOILER /!\ (surlignez le texte pour lire) : Pour illustrer mon propos, je vais prendre l'exemple de Zabuza que l'on rencontre lors de la première mission de l'équipe 7. Au premier abord, c'est un ennemi qui met en péril la mission et qui apparaît comme un tueur sans pitié. Or, le personnage est humanisé lorsque son compagnon Haku meurt pour le protéger. Il n'arrêtait pas de le traiter comme un objet mais Naruto lui fait ouvrir les yeux sur les sentiments qu'il est capable de ressentir. On comprend qu'il a été manipulé par le système terrible des ninjas : ils doivent faire abstraction de leurs émotions et être simplement une arme. On perçoit ainsi mieux le fonctionnement du monde des ninjas et cela apporte de la profondeur à l'histoire.

 

Renard à neuf queues
Les différents arcs narratifs sont plaisants et divertissants à lire même si le manga peut parfois être assez répétitif et linéaire. C'est toutefois toujours un plaisir de plonger dans les aventures de Naruto, de voir jusqu'où il peut aller et s'il réussira à réaliser son rêve !

Si Naruto vous plaît, courez vite tel un ninja dans la librairie la plus proche pour découvrir ce manga mythique. Ou si vous connaissez déjà, je vous invite à lire Mario (seulement disponible au Japon pour le moment), un autre manga de Masashi Kishimoto en un seul tome actuellement mais qui pourrait devenir le nouveau chef d’œuvre du mangaka !


Mélanie

jeudi 13 novembre 2014

Atlantis, les fils du rayon d'or

 Atlantis
Les fils du rayon d’or
Collection Fantazy
Pierre Bordage
Edition j’ai lu, 1998


                                          Synopsis :

    Nous suivons dans ce roman le récit des aventures de Tcholko, jeune guerrier chasseur d’une tribu des steppes de Sibérie. L’histoire se déroule quelques milliers d’années avant notre ère. A la suite d’une chasse hors de son territoire, Tcholko fait la connaissance d’une jeune femme d’une beauté peu commune. Arthéa est son nom. La chamane du clan de Tcholko avait prédit un voyage. Ensemble ils vont entreprendre un long périple au travers des déserts glacés pour finalement atteindre un monde nouveau empli de merveilles et de dangers : une île, perdue dans l’océan, qu’on nomme l’Atlantide.


Explication :

Cette œuvre de Pierre Bordage fait suite à un jeu vidéo, Atlantis, secret d’un monde oublié (1997). L’histoire du roman et du jeu revisite le mythe de l’Atlantide au cours d’une préhistoire imaginaire. Ce qui nous intéresse dans ces deux œuvres et plus particulièrement dans le roman de Bordage, c’est bien évidemment toute la dimension mystique qui s’en dégage et qui a un impact direct sur les péripéties des personnages principaux. On retrouve cette éternelle lutte entre le bien et le mal, l’impact de la religion sur les peuples et la façon dont les mythes façonnent les sociétés. 

Ici la religion atlante est fondée sur le culte d’Ammu, déesse de la lune et Sa’at le dieu soleil (représenté par un taureau). Ammu est supérieure à Sa'at, son serviteur. Cette hiérarchie divine donne un caractère matriarcal à la société atlante. 

Dans le culte, les prêtresses d'Ammu disposent d'une autorité supérieure à celle des prêtres de Sa'at. Dans le domaine politique, l'Atlantide a toujours été gouvernée par une reine, représentante d'Ammu, assistée par un consort, représentant de Sa'at. Le pouvoir royal est transmis de manière héréditaire. Le consort, en revanche, n'exerce sa charge que pour une durée limitée. Il accède à ce rang en remportant les jeux organisés tous les sept ans, puis en affrontant victorieusement le consort précédent lors d'un concours nommé l'Épreuve, et exerce alors le pouvoir aux côtés de la reine pendant sept ans. Au terme des sept ans, il doit se soumettre à l'Épreuve et se confronter au nouveau vainqueur des jeux. S'il ne meurt pas dans l'affrontement, il reste au pouvoir pendant sept autres années, et ainsi de suite.


Dans notre aventure les deux héros devront déjouer les complots qui visent à instaurer un nouvel ordre sur Atlantis. Un ordre qui, vous devez vous en douter, privilégie l’intolérance, la force, la haine de l’autre et fait la guerre à la compassion, la paix et l’amour universel (du déjà vu, c’est vrai, mais le talent de Bordage remplit son office d’autant plus qu’il excelle dans son genre).


De la Préhistoire en passant par l’Antiquité, la lune ou le soleil sont présents dans de nombreuses croyances dispersées à travers le monde. Les deux astres sont déifiés par presque toutes les civilisations

La divinité lunaire n’a pas vraiment de sexe. Tantôt femme en Grèce, en Italie ou en Chine, elle est mâle au Proche Orient, en Inde ou en Egypte. Néanmoins les vertus qui lui sont attribuées riment souvent avec fertilité et fécondité. Le soleil lui, est souvent vu comme masculin même si il y a des cas féminins. Il symbolise alors le pouvoir, la puissance. Ainsi les Aztèques appelaient Huitzilopochtli, dieu du Soleil et de la guerre, le maître du monde. Dans les mythologies mésoaméricaines, les dieux solaires étaient de jeunes mâles dotés de la vigueur du soleil levant. Dans la mythologie romaine et dans un registre moins sombre, Sol est le dieu du soleil (évident n’est-il pas), de la chaleur. Il est le frère de Luna. A eux deux, ils symbolisent les saisons. Dernier exemple, qui se rapproche celui-ci de notre cas. En Mésopotamie, à Sumer, 2500 ans avant J-C, la lune a été adorée sous le nom de Sîn ou de Nanna («Le lumineux »). Ce dieu, masculin, était représenté comme certains autres dieux sumériens par un taureau. Dans cette civilisation, le soleil n’est que le fils du dieu lune. L’épouse de ce dieu, Ningal, le croissant de la nouvelle lune, est signe de fertilité pour les champs et pour les hommes.



J’espère vous avoir intéressé, n’hésitez pas à lire Atlantis si l’envie vous prend. Mais, quel que soit votre verdict, n’oubliez pas que Pierre Bordage est un écrivain prolifique et qu’il compte bon nombre d’autres romans (beaucoup plus épiques dans les aventures qu’ils proposent). 

A très bientôt pour une nouvelle chronique.

Vincent 

Pour les étudiants de l'IUT Quai Frissard, cet ouvrage est en prêt au Centre de Doc' !

vendredi 7 novembre 2014

EverWorld, la trilogie

Œuvre : Roman
Titre(s) : EverWorld. Tome 1 : À la recherche de Senna ; Tome 2 : L'Épopée fantastique ; Tome 3 : Le Voyage sans retour.
Auteur : Katherine Alice Applegate
Utilisation Mythologique : Inspiration des univers mythologiques grecs, romains, aztèques, arthuriens, etc.

L'ESSENTIEL :

Points positifs :
– Des personnages à la psychologie réaliste, qui ne sont pas des héros.
– Les différentes mythologies au service de l'histoire se mélangent sans problème.
– Il y a Merlin l'enchanteur !


Points négatifs :
– Une certaine répétitivité peut se ressentir avec le deuxième tome.
– On peut prévoir certains des retournements de situations.

Huitzilopochtli, comme il est dépeint dans le
codex Borbonicus

Ah, EverWorld... Cette trilogie de romans traîne dans ma bibliothèque depuis une bonne dizaine d'années, et je ne me suis pas privé de les relire un bon nombre de fois.
Mais qu'est-ce donc qu'EverWorld, me demanderez-vous ?
 Eh bien, je vais vous l'expliquer :
Les quatre personnages principaux, des adolescents bien de chez nous, confrontés aux problèmes de famille ou de lycée, sont, du jour au lendemain, propulsés dans EverWorld, un monde où se côtoient sans la moindre distinction guerriers vikings et aztèques, chevaliers de la Table Ronde et animaux parlants, sorciers Africains et Atlantes...
Oui, mais si ce n'était que ça, ce serait trop simple : ce monde est gouverné par des divinités mythologiques. TOUTES les mythologies. Ne soyez donc pas étonnés si, dans les premiers chapitres, les héros se font interroger par Loki (Dieu Nordique de la Discorde), avant d'être embarqués dans une guerre contre Huitzilopochtli (le dieu Aztèque de la guerre).



Loki, tiré d'un manuscrit Islandais du XVIIIe siècle

Et c'est là que commence l'histoire : la survie de quatre adolescents dans un univers qui ne leur correspond absolument pas et auquel ils devront pourtant s'adapter. Et au passage, retrouver Senna.
Qui est Senna ? Le cinquième membre de leur petit groupe, elle aussi propulsée dans EverWorld, mais qui s'est mystérieusement échappée lors du voyage.
Katherine Applegate nous entraîne dans son univers, un patchwork de différents mondes assemblés sans la moindre volonté de cohérence, mais qui pourtant s'associent avec harmonie pour donner un univers unique. Les héros voyageront donc sur les contrées verdoyantes d'Irlande, pour errer ensuite dans un désert africain, erreront dans les entrailles du monde, et visiteront les confins des océans, le tout après une unique heure de marche. Brutal, comme changement...





Tyr et Fenrir, John Bauer
Les personnages ne sont pas en reste. En gros, ils vont réagir comme le feraient des humains normaux propulsés dans un univers de fantasy : refus d'y croire, incompréhension, crises de panique, poussées d'adrénaline lorsqu'il s'agit de foncer pour survivre...
Car oui, ne croyez surtout pas que, parce qu'il s'agit d'un univers de fantasy, tout le monde est beau et gentil, et qu'il n'y a qu'un seul grand méchant qui veut la peau des héros. Non, non, non, ce serait beaucoup trop simple, ça : Chaque personnage a son histoire et ses propres intentions. Si le chef des vikings protège les héros, est-ce parce qu'il est gentil, ou parce qu'il peut s'en servir comme monnaie d'échange pour plus tard ? Est-ce que ces extra-terrestres menaçants vont me découper en rondelles, ou veulent-ils juste faire du commerce ? Ce sanglier sera-t-il mon prochain repas, ou va-t-il me faire du chantage ?



Mis à part les chevaliers de la Table Ronde, on ne saura jamais d'avance sur quel pied danser avec chaque personnage, puisque chacun peut soudainement retourner sa veste et trahir les héros.
Sans compter que les héros en question... n'ont strictement rien d'héroïque ! Ce sont des adolescents, et si une chose est sûre, c'est qu'un ado accomplit rarement des faits d'armes dignes d'être racontés par les ménestrels. Condamnés à être ballottés dans un monde dont ils ne connaissent rien, ils ne pourront que jouer sur leur ruse et leur aptitude à mentir (inédite dans le monde d'EverWorld) pour se tirer du pétrin. Alors inutile de s'attendre à des combats épiques, vous n'en aurez pas. Même lors des scènes de bataille, on ne peut pas vraiment dire que les personnages soient vraiment des seigneurs de guerres confirmés, agissant plus par réflexe que par talent.
Alors que font-ils ? Ils essaient de ne pas se faire tuer, tout simplement. Et croyez-moi, dans un univers comme celui d'EverWorld, il n'est vraiment pas facile de voyager d'une ville à l'autre sans mettre sa vie en jeu. Pourtant, c'est ce qu'ils font, pourchassant le fragile espoir de tomber sur quelqu'un – ou quelque chose – qui pourra les renvoyer dans leur monde.


Héphaïstos forgeant la foudre de Zeus,
par Rubens, Musée du Prado
Maintenant, n'allez pas croire que tout est parfait : certains retournements de situations ne sont pas bien difficiles à prévoir, et les héros ne souffriront jamais plus que nécessaire. On est dans un livre pour ados, quand même ! De la même manière, pas de surenchère de détails gores ou obscènes. Certes, l'univers se veut réaliste, mais pas non plus au point d'égaler Le Trône de Fer/Game of Thrones (ou Berzerk, pour les amateurs de mangas) en termes de violence physique, psychologique ou morale. EverWorld en est même trèèèèès très loin.

Mais individuellement, les héros ne sont pourtant pas en berne : chacun a une psychologie et suit une évolution cohérente avec son vécu. Ils ont une personnalité de base, mais également des souvenirs, des tics ou des préférences religieuses. Leurs différentes manières de percevoir le monde qui les entoure engendrera des disputes, des dissensions dans l'équipe, et pourra même leur attirer des problèmes.

Après, on arrivera au principal défaut de l’œuvre, notamment repérable avec les deux premiers tomes : Les héros n'ayant grosso-modo aucun but dans EverWorld (ils ne sont pas là pour tuer les méchants, ni pour se faire un nom. Ce sont juste des gugusses se trouvant au mauvais endroit), l'histoire est assez répétitive. Et je parle d'histoire en terme d'intrigue : les héros avancent au hasard, rencontrent un obstacle, s'en débarrassent, puis recommencent à avancer au hasard.


Ce n'est vraiment qu'avec le troisième roman, où seront révélés bon nombre d'éléments, et qui feront apparaître de nouvelles menaces, qu'un but sera alors clairement défini pour les personnages principaux, désormais contraints de faire des choix. Et le pire de tous, celui qui leur demandera le plus grand des sacrifices. Ou le moindre.
Je n'en dis pas plus, je ne réussirais qu'à vous spoiler. En attendant, j'espère vous avoir donné envie de découvrir l'univers d'EverWorld !

Albin