jeudi 26 février 2015

Les Mémoires de Zeus - Maurice Druon, de l'Académie Française

"Moi, Zeus, roi des dieux, dieu des rois, je vais vous conter mon histoire."

Maurice Druon (1918-2009) est l’auteur d’une cinquantaine d’ouvrages, allant du conte au roman historique. Résistant pendant la guerre, il reçoit juste après celle-ci, en 1948, le prix Goncourt pour Les Grandes Familles. Il rejoint l’Académie Française en 1966.
Les Mémoires de Zeus, rééditées par les éditions Bragelonne, réunit les deux tomes de ce dyptique ainsi qu’une préface de l’auteur. 

Synopsis :
Zeus se réveille d’un sommeil long de 2000 ans et découvre ce que nous, les Mortels, sommes devenus depuis la fin de son règne. Il constate alors que nous l’avons oublié et que nous sommes toujours aussi petits, querelleurs, orgueilleux… Zeus, roi des dieux, dieux des rois, décide alors de nous raconter son histoire, dans l’espoir de nous rendre meilleurs, en nous expliquant que la vie n’est pas plus facile pour un dieu…

Statue de Zeus
Les plus :
- Toute la mythologie grecque est couverte par le récit, sans détails négligés ou omis.
- Le premier tome, L’Aube des Dieux, est très intéressant : il comporte la description de la création du monde et de l’accession au pouvoir de Zeus.
- Certains éléments du roman tendent vers la Science-fiction et la Fantasy.
- Une très belle écriture, érudite, mais qui ne nécessite pas le recours à un dictionnaire pour être comprise.
- Le personnage principal, qui est pourtant un dieu, est finalement attachant car très humain.
- Une œuvre qui amène à réfléchir sur des thèmes extrêmement variés, sans jamais faire la morale.

Les moins :
- Sans être mauvaise, la fin du deuxième tome, Le Jour des Hommes, est un peu en-dessous du reste, surtout le passage avec Héraclès qui traîne en longueur...
- Quelques idées et arguments peuvent faire tiquer, voir même choquer le lecteur.


Zeus possède un véritable don de conteur. En écoutant son récit, nous vivons toutes les étapes de la mythologie grecque, et pas seulement les épisodes les plus importants. Maurice Druon a réalisé un travail de recherche homérique pour réunir tous ces mythes éparpillés, sans chronologie, parfois même contradictoires. On obtient un texte parsemé de rebondissements, aux intrigues multiples, qui se lit avec une facilité déconcertante.

Le mont Olympe, Grèce
En effet, il ne faut surtout pas trembler devant l’académicien. Sa prose est certes érudite, élégante, mais on est bien loin de la complexité de certains auteurs du début du XXe siècle à la recherche d'un temps perdu. On ne s’ennuie jamais vraiment, sauf, je dois l’avouer, dans l’avant-dernière partie du livre. Si le tome 1 est particulièrement passionnant, car expliquant la création du monde et les premiers temps du règne de Zeus... j’ai trouvé le tome 2 un peu moins intéressant et notamment lorsque le dieu nous narre les mythes célèbres, dont les travaux d’Hercule. Le fait de bien connaître ces péripéties m’a probablement rendu la lecture moins surprenante.

C’est avec L’Aube des Dieux (le tome 1) que le récit flirte le plus avec la science-fiction : le monde est façonné par Ouranos, le Ciel, une entité qui arrive d’un lieu reculé de l’Univers et qui, connaissant le secret du "Chiffre", peut créer la vie… Maurice Druon aborde tous les thèmes (l'existence, la mort, la guerre, la politique, l'amour, la sexualité...) à travers son récit. Il réactualise les mythes grecs pour nous faire réfléchir sur nous-mêmes, pour exposer des idées parfois très modernes (je pense notamment à sa vision extrêmement tolérante de l'homosexualité). Évidemment, on ne peut pas toujours être d'accord avec l'auteur et certaines de ses idées ont du potentiel pour choquer le lecteur : les arguments contre le monothéisme ne pourront pas être au goût de tout le monde... après tout, Zeus fait aussi parfois preuve de mauvaise foi (j'ai relevé quelques situations un brin sexistes). Cependant, que l'on soit d'accord ou non avec lui, on ne peut qu'admirer la manière dont l’auteur se sert de ces fables, de ces allégories que sont les dieux pour en tirer une morale. Ainsi, grâce au Mémoires de Zeus, Maurice Druon nous rappelle que "les mythes sont la mémoire du monde".

Quentin.

Pour les étudiants de l'IUT Quai Frissard, cet ouvrage est en prêt au Centre de Doc' !

jeudi 19 février 2015

American Gods (2001) - Neil Gaiman

Résumé :
États-Unis, années 1990. Ombre est ce que l'on pourrait appeler « un poissard de première » : orphelin, il était néanmoins parvenu à s'aménager une petite vie tranquille avec sa femme Laura ainsi que son associé et ami... jusqu'à ce qu'il passe trois ans en prison pour une erreur stupide. A son retour, il apprend que non seulement ceux-ci sont morts dans le même accident de voiture, mais qu'en sus ils avaient une aventure.
Au fond du trou, sans emploi, ami, ni famille, il va croiser la route d'un vieil homme répondant au nom de Voyageur qui va l'embaucher en tant que garde du corps et surtout l'embarquer pour un voyage dans les tréfonds de l'Amérique. Une épopée épique qui va les amener à rencontrer toutes les composantes de la spiritualité outre-Atlantique aussi bien passée que présente, et surtout à participer à la plus grande bataille divine que le monde ait connu. Oui, rien que ça.
Vous me permettrez de passer outre toutes les circonvolutions de l'intrigue, mais attendez-vous néanmoins à de nombreux rebondissements et à une conclusion aussi épique qu'une saga nordique.

Critique : 
Neil Gaiman, Avril 2013
L’œuvre de Neil Gaiman, primée à quatre reprises en 2002 (Prix Hugo, Prix Nebula, Prix Locus, Bram Stocker Award) peut se lire à deux niveaux. D'une part, elle peut être considérée comme un roman picaresque, voire une version littéraire d'un « road movie » : le lecteur suit les pérégrinations de deux personnages qui traversent les États-Unis, rencontrent des protagonistes hauts en couleurs tout en apprenant à se connaître et en évoluant en tant qu'individus.

D'autre part, nous avons le cœur de ce qui constitue le cœur de l'intrigue, à savoir la plongée dans les croyances américaines ainsi que leur confrontation.
En effet, le postulat de ce roman est que si les dieux ont commencé à exister à partir du moment où un individu a commencé à croire en eux, il n'y a aucune raison de penser qu'ils ont cessé de le faire au moment où d'autres croyances ont commencé à les supplanter. Tout aussi important, il établit que lors des vagues de colonisation et d'immigration successives en Amérique du Nord, les dieux (ou leurs équivalents) ont été forcés de suivre leur fidèles sur cette terre étrangère où ils ont progressivement perdus leur force à force que la foi dont ils se nourrissaient s'étiolait. Pas au point de les faire disparaître, parce que cela impliquerait que le monde aurait perdu jusqu'au souvenir de leur existence, mais les forçant à adopter une forme physique en permanence et les dotant de besoins physiologiques comme la faim.
Ainsi, Ombre croisera un leprechaun (espèce de lutin roux d'origine irlandaise) à taille humaine et S.D.F, le dieu slave Czernobog qui est employé dans un abattoir, Compé Anansi (dieu important du folklore d'Afrique de l'Ouest et des Caraïbes), Wisakedjak (divinité tutélaire amérindienne) qui travaille au mont Rushmore... la liste est longue et il serait vraiment trop long d'en faire un bilan exhaustif ici, d'autant plus que nous nous rendons vite compte que la croyance moderne s'est cristallisée dans des supports à la fois originaux et prévisibles. Les antiques sont ainsi confrontés aux dieux de l'internet, des autoroutes, de l'argent, d'Hollywood, voire du Monde dans une guerre froide qui ne va pas tarder à se réchauffer.

Une autre richesse de American Gods réside dans la façon très réaliste dont est écrite l'intrigue. Si le fantastique est par définition présent, on n'assistera à proprement parler à aucun miracle ou acte magique important... et si cela advient, on nous présentera toujours cela sous l'angle de l'hallucination possible : a-t-on vraiment vu tel personnage se transformer ? Ombre a-t-il rêvé tout cela ? Certains passages peuvent être extrêmement crus (on compte au moins deux scènes de sexe et une de mise à mort sanglante), mais n'est-ce pas le propre des récits mettant en scène des dieux depuis l'Antiquité ? Bref, nous pouvons dire qu'il s'agit du principe de la tragédie grecque remise au goût du jour, le côté épique étant apposé par petites touches jusqu'au dénouement.

Représentation du dieu Thôt
A titre d'exemple, voir messieurs Iblis (qui ne cache pas le fait qu'il soit Thôt, le dieu égyptien à tête d'ibis de la connaissance) et Chaquel (interprétation d'Anubis, dieu égyptien des embaumements à tête de chacal) tenir avec le plus grand sérieux une petite entreprise de pompes funèbres dans la petite ville d'Alexandria a quelque chose... comment dire ? D'à la fois ironique et triste, puisque symbolique d'une époque où tout change mais où des valeurs et des croyances fondamentales demeurent. Non pas perverties, mais influencées par le passage des ans et le melting-pot des cultures américaines qui ont déferlé par vagues sur ce continent.

Le choix de Neil Gaiman de ne pas vraiment s'attarder sur la mythologie attachée à tel ou tel personnage semble être l'écho de ce constat : les dieux ont été interprétés physiquement et spirituellement de multiples façons, et c'est généralement au lecteur de déterminer qui est qui via les indices qu'il récolte puis de se renseigner par lui-même pour comprendre son tempérament... ou de ne pas le faire et de se laisser porter par le récit, ce qui est tout aussi pertinent.

Au final, que rajouter à tout cela sinon que je vous conseille vivement la lecture de cet ouvrage dont la narration fluide et les multiples références aussi bien spirituelles qu'artistiques susciteront je le pense un écho chez vous. Le tout est de ne pas se laisser impressionner par l'épaisseur du livre.
Nul doute que vous y trouverez votre Carthage.

Félix

jeudi 12 février 2015

Zeus, coach en séduction.

Pour la Saint Valentin, nous vous avons préparé un article spécial... Chacun de nous vous propose une des "histoires d'Amour" de Zeus (liste non exhaustive, il y en a bien plus). 
Chroniques des Panthéons vous prévient, suivre les méthodes du dieu des dieux n'est peut-être pas conseillé...

 

Mnémosyne

Elle est la fille de Gaia et d'Ouranos, deux divinités primordiales dans la mythologie grecque. Gaia est l'ancêtre maternel des races divines. Ouranos, par ailleurs fils de Gaia, est aussi un de ses époux. Il personnifie le ciel et la vie.

De leur union naquirent bien des êtres divins (titans, cyclopes…). Mnémosyne est une titanide. Elle est la déification de la mémoire. Elle passe pour avoir inventé les mots et le langage, donnant un nom à chaque chose et nous offrant ainsi la possibilité de nous exprimer. Zeus, maître de l’olympe est séduit par son charme. Par un de ses malicieux artifices, il se changera en berger (la rusticité plaît aux femmes, c’est bien connu) pour conquérir le cœur de la belle. Ainsi, pendant neuf nuits d’affilée, nos deux amoureux s’envoyèrent aux cieux comme seuls les dieux savent le faire. Par la suite elle accouche de neuf filles : les Muses (en cas de problèmes de fertilité, appelez Zeus ou Mnémosyne).

Chacune de ces muses correspondait à un domaine de la connaissance. La littérature avec Erato et Calliope, respectivement pour la poésie légère et épique. Le théâtre avec Melpomène et Thalie, la tragédie et la comédie. La musique avec Euterpe. Le chant avec Polymnie. La danse avec Terpsichore. Et enfin l’histoire et les sciences avec Clio et Uranie. 
Vincent.


Athéna jaillissant du crâne de Zeus
Métis
Parlons un peu de la première conquête de Zeus : Métis, la déesse de la Ruse. Il la convoite depuis un bon moment, mais elle ne cesse de se métamorphoser pour lui échapper. Et elle a bien raison de s'enfuir... Mais il parvient tout de même à la conquérir et elle tombe enceinte très vite. Pour le moment, tout va bien. Jusqu'au jour où un oracle prédit que son deuxième enfant détrônera Zeus...Que faire devant une telle menace ? L'enfermer ? Non, trop facile...La tuer ? Non, trop cruel... La manger et s'approprier ses qualités ? Non, il ne va pas oser... Et pourtant si ! Il va piéger Métis en lui demandant de se transformer en diverses choses, notamment en goutte d'eau. Et il l'avalera... 

Mais il reste un petit problème : Métis n'a pas accouché... soudainement Zeus est pris d'un violent mal de tête et Athéna, la déesse de la sagesse et de la guerre jailli du crâne de son père tout en armure et munie des vertus de sa mère.
Mélanie.

 

Ganymède

Si vous pensiez être à l'abri des faveurs de Zeus, messieurs, lisez donc ce qui suit.
Ce jour-là, le Roi des dieux se prélassait sur un nuage lorsqu'il se pencha vers sa grand-mère, la Terre, pour observer les Hommes. Son divin regard se posa sur Ganymède, le fils du Roi Tros. Étendu au milieu d'une prairie, entouré par son troupeau de moutons, le jeune homme dormait paisiblement. A la vue du le plus beau des mortels, ce fut pour Zeus un véritable coup de foudre. Au sens figuré (Ganymède ne finit pas carbonisé). Le dieu pris alors l'apparence d'un aigle majestueux qui fondit sur le prince et l'enleva.
Une fois sur l'Olympe, Zeus en fit son échanson : Ganymède, le Verseau, lui sert désormais à boire (et plus si affinités), à la place de sa fille Hébé, déesse de la Jeunesse. Malgré la colère et la jalousie de sa mère Héra, Hébé, quant à elle, apprécia que son père assume enfin sa bisexualité.
Quentin.

Callisto
Voici l'histoire de Callisto, une nymphe prêtresse d'Artémis (fille de Zeus et déesse de la chasse et de la nature), à qui la jolie damoiselle avait juré fidélité et une chasteté éternelle. Sauf que Zeus, en apercevant Callisto depuis son nuage, en tomba éperdument amoureux. Mais pour passer outre la promesse de virginité de la jeune fille, le dieu des dieux choisit de prendre une autre apparence. Celle... d'Artémis.
Toujours est-il que Callisto se laissa duper. Manque de chance, elle tomba enceinte au passage. Lorsqu'elle s'en rendit compte, Artémis (la vraie, cette fois), entra dans une rage folle et menaça la pauvre nymphe de la transformer en cible mobile si elle ne se carapatait pas dans la seconde. Comme si ça ne suffisait pas, Héra, la femme de Zeus, agacée par cette énième escapade nocturne de son mari, transforma la nymphette en ourse, la condamnant à se cacher dans les montagnes.

Quelques temps plus tard, Artémis (extrêmement rancunière), retrouva l'ourse, et la tua d'une flèche. Zeus, se sentant responsable (ça devait être la première fois qu'il éprouvait des remords...), récupéra Callisto, et la mit dans les étoiles, faisant d'elle la constellation de la Grande Ourse. Leur enfant, quant à lui, la rejoindra plus tard pour devenir la Petite Ourse.
Albin.

L'Enlèvement d'Europe,
D. Vélasquez
Europe
L’Europe... son étymologie divise les chercheurs mais une des origines probables de ce nom remonte aux grecs de l'Antiquité et à un mythe : celui de la liaison entre Europe et Zeus. Une fois n'est pas coutume, Zeus fut attiré par une phénicienne nommée Europe dont la beauté était sans pareille. Afin de se cacher de sa femme Héra et d'approcher subtilement la jeune fille, Zeus prit l'apparence d'un magnifique taureau blanc. A l'approche du majestueux animal, Europe fut tout d'abord effrayée mais, rapidement séduite, elle accepta de monter sur son dos. Zeus l'enleva et l'amena, à la nage, jusque sur l’île de Crète où il la viola.


De cette étreinte forcée naquirent trois enfants dont Minos, le futur roi de Crète et instigateur du célèbre labyrinthe.
Damien.

Alcmène
Chers lecteurs, poursuivons notre tour d'horizon des conquêtes du plus prolifique de tous les dieux greco-romains avec l'affaire Alcmène. D'après la légende, celle-ci était dite fille d'Electryon (descendant de Persée ainsi que d'Andromène, et accessoirement roi de Mycènes) et épouse du roi Amphitryon de Tirynthe. Il est dit également qu'elle fut séduite par le maître de l'Olympe qui avait pris l'apparence de son mari alors que celui-ci était en campagne militaire, et qu'en amant insatiable il avait même ordonné au dieu du soleil Helios de ne pas se lever durant trois jours. Mais l'histoire ne s'arrête pas là ! De retour de guerre, le véritable Amphitryon ne s'aperçoit pas de la supercherie et honore à son tour sa femme, la rendant enceinte d'un certain Iphiclès.

Il en résulte que la reine finit par accoucher de deux enfants : l'héritier légitime en premier parce que  la déesse Héra aurait retenu suffisamment longtemps les déesses de l'accouchement, les Illithyes. Et devinez qui est le bâtard à l'illustre ascendance ? Un certain Hercule, qui héritera, en sus d'un destin aussi prodigieux que tragique, du goût pour les femmes de son paternel. Mais ceci est une autre histoire…
Félix.

 


Danaé, G. Klimt
Danaé 
Elle est la fille d’Acrisios, le roi d’Argos. Un oracle ayant prédit à ce dernier que son petit-fils le tuerait, il boucla sa fille dans une tour de bronze scellée par des portes d’airain gardées par des chiens féroces. Cependant, de telles précautions n’étaient pas suffisantes pour empêcher Zeus de parvenir à ses fins. Ainsi, le dieu rendit visite à Danaé sous forme d’une pluie d’or et la rendra mère de Persée. Acrisios apprit le méfait et ne voulut pas croire que le père était Zeus mais Proetos, son propre frère. Se refusant à tuer sa fille, le roi l’enferma avec son petit-fils dans un coffre en bois qu’il lança à la mer. Celui-ci flotta jusqu’à l’île de Sériphe et les deux survivants firent recueillis par Dictys, un pêcheur. Il les amena à son frère le roi Polydecte. Le souverain éleva le garçon et voulu épouser Danaé qui refusa.

C’est l'une des raisons pour lesquelles Persée partit combattre Méduse : Polydecte ne voulait plus qu’il soit un obstacle de plus à son union et l’envoya en espérant bien qu'il y laisserait sa peau.
Fiona.

Io
Io, prêtresse au temple d'Héra, est un jour remarquée par le puissant Zeus, dont elle devient rapidement la maîtresse. Le dieu la rencontre lors de nombreux rendez-vous en prenant la forme, pour plus de discrétion, d’un nuage. Mais cela ne suffit pas à tromper la vigilance d'Héra, qui surprend les deux amants. Afin de la sauver de la colère de sa femme, Zeus changea Io en génisse blanche. Toujours à l’affût, Héra, qui est loin d'être dupe, demanda la vache en présent. Zeus continuera à rendre visite à Io en cachette, en se changeant en taureau. Afin de contrer une nouvelle fois son époux, Héra confia la génisse au géant Argos « celui qui voit tout », géant aux 100 yeux, dont 50 sont aux aguets tandis que les 50 autres dorment.
Zeus chargera alors son fils Hermès de tuer le géant. Après l'avoir endormi grâce à une longue histoire et le son de sa harpe, Hermès coupa la tête du géant dont Héra récupérera les yeux pour en parer la queue de son animal fétiche : le paon.

Héra envoie alors sur Io un taon qui la pique sans relâche, la forçant à s'enfuir. 
Durant cette fuite, elle rencontrera Prométhée, enchaîné sur le mont Caucase, qui lui révélera qu'elle deviendra l’ancêtre d'Hercule. 

Charlène.

Joyeuse Saint Valentin à tous !

jeudi 5 février 2015

Princesse Mononoké - Hayao Miyazaki

Le 16 février 2015, Chroniques des Panthéons vous attend au cinéma Le Studio à 20h, pour une projection exceptionnelle de Princesse Mononoké.

Miyazaki a su marquer l'univers du film d'animation dans le monde entier, avec ses œuvres emplies d'imaginaire et de créatures fantastiques. En gardant un dessin traditionnel du début à la fin de sa carrière, il nous a immergé dans ses mondes merveilleux. Pour l'ensemble de sa carrière, il a dernièrement obtenu un Oscar d'honneur.

Princesse Mononoké est un film épique et éblouissant, ayant reçu un succès à la hauteur du travail demandé. En effet, sa réalisation a nécessité presque trois ans. La musique est signée de Joe Hisaishi et accompagne à merveille ce chef-d’œuvre de l'animation japonaise.

Bien que le titre soit dédié à la Princesse, le film conte l'histoire d'Ashitaka, un jeune prince du peuple Emishi, chose rare dans les films de Miyazaki car d'ordinaire le rôle principal est attribué à une femme. Victime d'une malédiction mortelle, formant des marques étranges sur son bras et le dévorant peu à peu, il est ainsi forcé de quitter son village pour trouver un remède. Dans sa quête, il se retrouve au milieu d'une guerre sans merci opposant les humains et les dieux de la forêt.

Historiquement, le récit se déroulerait dans le moyen-âge japonais, c'est à dire l'ère Muromashi, une période connue pour ses nombreux conflits et ses mutations sociales, politiques et technologiques. Symboliquement, le film raconte un conflit entre la nature et la civilisation en pleine évolution à cette époque. Du côté de la nature, on a San, la "Princesse Mononoké", qui s'oppose à Dame Eboshi, chef du clan des forgerons voulant détruire la forêt et ses habitants.

Ère Muromashi  
Loin d'être manichéen, le film ne présente pas de "méchant". Chaque personnage poursuit un but qui lui est propre et légitime. Les liens entre les personnages, leurs conflits et leurs évolutions construisent le récit. La Princesse Mononoké ("chose étrange", "monstre" en Japonais) est la représentante de la nature. Rien que par son nom, elle est qualifiée de non humaine. Elle vit dans la forêt parmi les animaux (elle peut même leur parler) et défend ainsi son territoire contre l'invasion humaine. Luttant contre le progrès de la civilisation, elle est aussi vue comme une rebelle contre l'espèce humaine.

Dame Eboshi, quant à elle, symbolise de la civilisation. Pouvant être considérée comme une "méchante" puisqu'elle déboise la forêt pour nourrir le feu de ses forges, ses actions sont cependant motivées par le progrès et l'indépendance de l'homme avec la nature. Ainsi, elle veut se débarrasser du Dieu-Cerf, dieu de la forêt. De plus, elle fait preuve de nobles intentions en accueillant dans sa forteresse des lépreux, des prostituées...

On retrouve deux thèmes importants dans ce film : la Nature et la religion Shintoïste. Comme dans Nausicaä et Mon voisin Totoro, Miyazaki nous adresse un message écologique. L'homme n'est pas mauvais et c'est à travers Ashitaka, que l'on comprends les objectifs des deux camps, chacun soutenu par de bons arguments. La Nature est elle aussi représentée comme cruelle et sévère par Miyazaki.
Kami
Dans la mythologie japonaise, les esprits et les dieux se trouvent dans la nature. Miyazaki est shintoïste et croit donc à la présence des esprits, ou plus exactement de Kami, dans le moindre recoin de nature (montagne, cascade, forêt, etc.). Dans Princesse Mononoké, les animaux sont les kamis : splendides mais aussi cruels, ils représentent la nature.

Les Kamis peuvent être maudits, par ce qu'on appelle le Tatari ("malédiction"), dû au Tsumi ("la faute"). Pour les shintoïstes, dans un sens ancien, on peut être contaminé par le contact du sang ou d'un cadavre. Aujourd'hui, le Tatari a un sens plus moral : la souillure de l'âme par la péché. Dans le film, cette malédiction se compose de gros vers grouillant sur le corps du Tatari. Plusieurs personnages en souffrent, comme Nago, le Dieu Sanglier, au début du film, qui est à 'origine de la contamination d'Ashitaka. La purification est l'unique moyen de s'en débarrasser. Dans le film, San exécute le rite du Tamagushi (rite shintô) pour tenter de sauver Ashitaka. Cela consiste à plante une branche de Sakaki au sol pour attirer les faveurs des Kamis.

Kodama
Les Kodamas ("esprit de l'arbre") sont aussi présents. Il s'agit d'esprit vivant dans les arbres qui vont aider notre héros dans sa quête. D'après la légende, l'écho dans la montagne serait crée par ces esprits. Miyazaki les représente comme des petits êtres tout blanc et très mystérieux.

Les loups qui accompagnent San seraient aussi en lien avec la mythologie japonaise. Ils ressemblent aux Karashishi, des chiens-loups qui gardent les temples et se tiennent près des Torii (portail traditionnel japonais de temple shintoïste, séparant le lieu sacrée du lieu profane).
Enfin, la dernière représentation mythologique est celle du Shishi Gami, le Dieu Cerf, le Dieu de la forêt et de la vie et de la mort. C'est un personnage important car il symbolise la nature, voir même l'équilibre naturel de la vie. Dans le shintoïsme, il est la monture des dieux et est un symbole divin, avec ses représentations dans les Kakemonos.

Miyazaki veut que nous reprenons conscience que la nature est un élément essentiel de nos vies, et qu'elle peut être à la fois magnifique et terrifiante. La Nature peut abriter des êtres bienveillants mais aussi des monstres. Il faut accepter l'environnement et vivre en harmonie avec, selon Miyazaki.

Princesse Mononoké est un film remarquable, avec un ton plus grave que d'autres de ces films qui peuvent être plus léger. On plonge dans une ambiance plus pesante, accompagnée d'une richesse historique et mythologique. Teinté de quelques scènes assez violentes, le film peut choquer les plus jeunes. De toutes ses œuvres, il s'agit de la plus complexe et et la plus tragique, et l'une des plus réussies de sa carrière.

Et surtout, si vous voulez voir ou revoir Princesse Mononoké, rendez vous au cinéma Le Studio (Le Havre) le 16 Février 2015 à 20h !

Mélanie.